Branle-bas de combat sur le marché français des "viandes végétales"
Les substituts végétaux protéinés sommés de changer de nom, l'aéroport d'Orly se met au vert et une start-up forme les agriculteurs à la transition écologique. Voici le menu économie-écologie du jour.
La bataille sur la dénomination des “steaks végétaux” reprend
Le gouvernement annonce interdire les appellations de “viandes végétales”. Les entreprises françaises concernées dénoncent un non-sens économique et écologique.
“Tube végétal mi-long mi-rond aux herbes de Provence”, ça vous parle ? Il faudra pourtant que les “chipos” végétales de la marque HappyVore se trouvent bientôt un nouveau nom. Le gouvernement vient de signer un décret interdisant aux produits comportant des protéines végétales de porter un nom “désignant traditionnellement des denrées alimentaires d’origine animale”.
Loin des objectifs climatiques, on freine le recul de la viande
S’appeler “steak” ou “galette”, est-ce si important ? C’est un peu le nerf de la guerre, explique Romain Espinosa, chercheur en économie au CNRS et spécialiste de l’alimentation végétale. Car une vaste majorité des consommateurs de ces produits de substitution à la viande sont en fait les flexitariens (ceux qui décident de consommer moins de viande). Cela concerne environ un quart des Français. Or, “les études montrent que ces consommateurs ont davantage tendance à se reporter sur les substituts végétaux lorsqu’ils portent une dénomination proche des produits traditionnels à base de viande”, analyse Romain Espinosa.
Si la marque La VieTM dénonce avec ironie un décret qui “prend les Français pour des jambons”, l’économiste Romain Espinosa y voit surtout la patte du lobby de la viande. Un lobby qui freine des quatre fers pour que la consommation de viande ne diminue pas, à l’encontre des ambitions climatiques. Selon une récente étude du Réseau action climat et de la Société française de nutrition, il faudrait réduire de moitié la consommation de viande pour atteindre les objectifs climatiques de la France.
Instaurer une “concurrence déloyale”
Le décret ne contraint que les entreprises nationales, pas les produits importés. Par conséquent, les marques françaises peuvent s’attendre à ce que leurs consommateurs achètent davantage les produits des entreprises étrangères, qui continueront de s’appeler “steak végétal” et autres “nuggets végétaux”. “Typiquement, lorsqu’ils feront leurs courses sur le drive, les consommateurs tomberont sur les produits importés parce qu’ils chercheront des ‘steaks végétaux’”, témoigne Cédric Meston, co-fondateur de la marque de substituts végétaux HappyVore qui dénonce une “concurrence déloyale” des entreprises étrangères.
Sur un marché des substituts à la viande en plein essor, cela fait grincer les dents des entreprises françaises. Elles annoncent contester le décret devant le Conseil d’État… et concoctent de nouveaux noms en attendant.
Adèle Lebrun
“Mobiliser des financements pour l’atténuation, l’adaptation et la transition [face au changement climatique] est une priorité capitale, aussi pour nos économies. Sinon, les chocs climatiques nuiront aux performances de nos économies, au bien-être des populations et des entreprises.”
Kristalina Georgieva, présidente du Fonds monétaire international (FMI), lors du sommet du G20 à São Paulo (Brésil). Pour elle, les pays du G20 pourraient relever leurs économies et leurs perspectives de croissance s’ils se préoccupaient du changement climatique.
Icosystème, l’entreprise qui forme les agriculteurs à la transition écologique
Depuis 2017, la start-up propose des cours en ligne pour aider les agriculteurs à se lancer dans l’agroécologie.
Aujourd’hui, il existe des formations en ligne pour tous. Même pour les agriculteurs ! Icosystème est un centre de formation qui les accompagne dans leur transition agroécologique. Pour compléter ses cours en présentiel, la start-up a lancé en 2017 une plateforme d’e-learning. “On essaye d’être très innovants dans nos formations”, explique le directeur général associé, Arnaud Richard.
Les cours en ligne permettent d’acquérir les bases de l’agriculture régénératrice, une pratique qui repose sur le renouvellement des sols. Les agriculteurs peuvent ainsi passer d’un système conventionnel (qui utilise plus d’intrants chimiques, avec un rendement assez élevé) à un système plus résilient.
“Ce sont des formations assez techniques”, affirme Arnaud Richard. “On va parler de couverture végétale des sols, de fertilité, de matière organique… On pose les bases.” Ensuite, des journées de terrain permettent aux agriculteurs de découvrir les pratiques adaptées à leurs types de sols, de cultures et de conditions climatiques.
Perdre du rendement, mais rester gagnant
Pour les agriculteurs qui n’ont pas sauté le pas écologique, “ce qui fait peur, c’est le côté technique et la baisse de rendements”, évoque Arnaud Richard. Mais il en est convaincu, “ce n’est pas parce qu’on perd en rendements qu’on n’est pas gagnant !” Par exemple, utiliser moins d’intrants chimiques économise les tours de tracteur et les coûts de production. “Les agriculteurs peuvent s’y retrouver.”
Alors que le secteur agricole représente 18% des émissions de GES en France (d’après le Haut Conseil pour le climat), la formation des agriculteurs à de nouvelles pratiques semble essentielle. Mais son accès est inégal. Seuls 15% d’entre eux participent à des sessions de formation continue, contre 51% de l’ensemble des actifs, d’après Environnement Magazine.
Les cours en ligne peuvent être une solution. “On aimerait que notre plateforme devienne vraiment l’espace de formation des agriculteurs”, conclut Arnaud Richard. Le 26 février, au Salon de l’Agriculture, Icosystème a annoncé une levée de fonds d’un million d’euros afin de former 7.000 agriculteurs et techniciens agricoles.
Zoé Multeau
1.3 milliard d’euros
C’est le bénéfice net dégagé par Veolia en 2023. Numéro 1 mondial des services de l’environnement, Veolia commercialise des services de gestion du cycle de l’eau, des déchets et de l’énergie à des collectivités locales comme à des entreprises. Des résultats sans précédent et en hausse pour la septième année consécutive. Comme quoi, la transition écologique peut aussi rapporter gros !
Un virage vert pour Orly ?
Et si l’aéroport d’Orly devenait un “modèle” d’écologie d'ici à 2035 ? C’est le souhait du groupe ADP (Aéroport de Paris) qui lance une concertation publique sur le réaménagement de l’aéroport. Plus de cent communes sont invitées à donner leur avis jusqu’au 26 mai prochain.
Le groupe prévoit notamment d’éloigner les places de parking d’un kilomètre des aérogares. Une mesure qui pourrait dissuader les voyageurs et salariés de venir en voiture, alors que la route représente 40% des émissions de gaz à effet de serre de l’endroit. Pour ce faire, ADP compte sur le développement de navettes à proximité des parkings et sur les transports en commun. Dès juin, à l’approche des JO, la ligne 14 du métro sera aussi prolongée jusqu’à Orly. L'arrivée de la ligne 18 et l'extension du tramway 7 sont également prévues d'ici à cinq ans.
Pour devenir un aéroport “vert”, ADP mise aussi sur les énergies bas-carbone. Une transition qui passera par le déploiement de panneaux photovoltaïques ou l’utilisation de tracteurs électriques pour le déplacement des avions sur les pistes.
Les dessous du trafic d’espèces animales menacées
Vous vous êtes déjà demandé combien rapporte une écaille de pangolin ? Jusqu’à 5.000 euros pièce en Chine. "Mais qui achète ça ?", rétorquerez-vous. Eh bien, les trafiquants sont des experts en marketing ! Ils attisent la demande en faisant circuler les rumeurs les plus farfelues sur les vertus miracles de leurs produits : guérir de la COVID-19, du cancer…
L’épisode “Espèces menacées : se tailler la part du lion” du podcast Entendez-vous l’éco ? sur France Culture s’attaque au marché des espèces menacées. Comment expliquer sa rentabilité ? Comment se structure-t-il à l’échelle mondiale ? Vous saurez tout sur ce business qui pèse 15 à 23 milliards de dollars dans le monde.